Ce matin (jeudi 8 août) le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) publiait un nouveau rapport spécial sur les changements climatiques, l’état des sols qui se détériorent, la sécurité alimentaire elle-même menacée, les flux de CO2 émis toujours croissants etc. Soit un certain nombre d’observations et d’avertissements sur les graves conséquences que cela pourrait avoir dans les années à venir. On ne parle d’ailleurs à présent plus que de dizaines d’années…
Il y a à peine quelques jours, Greta Thunberg faisait l’objet de critiques au sujet de son discours jugé trop radical et pessimiste. Il est vrai que de simplement culpabiliser politiciens et citoyens n’est ni utile ni efficace à un réel changement car cela n’amène aucune solution par la suite. D’autant plus qu’affirmer que personne ne fait rien est faux et c’est précisément le sujet que je voudrais aborder.
Dans cet article, j’aimerais mettre en avant quelques travaux scientifiques déjà réalisés ou en cours d’élaboration, qui proposent des solutions envisageables à court ou long terme. Je pense que l’on entend trop ce discours catastrophiste (sans pour autant remettre en cause l’ampleur du phénomène, bien au contraire, je suis tout à fait consciente de la gravité de la situation climatique.) et que l’on devrait mettre plus en avant l’écologie “positive”. Ce n’est certes pas nouveau mais il me semble que l’importance des événements et le pessimisme croissant venant des médias et des lanceurs d’alerte n’a fait que mettre l’optimisme et l’espoir au second plan. Il ne s’agit pas d’être utopique ou naïf, mais simplement de rappeler que l’humain est aussi conscient et doté d’une intelligence extraordinaire, sans cesse à la recherche de solution.
Les plantes, une source d’inspiration inestimable
S’inspirer des plantes pour sauver l’écosystème et lutter contre le réchauffement climatique semble être une des solutions les plus cohérentes. L’homme étant le seul responsable de la situation, certains scientifiques étudient le fonctionnement de la nature et plus particulièrement son équilibre. (voir l’hypothèse de Gaïa et théorie de l’équilibre ou homéostasie de la nature)
Ainsi, en cherchant à imiter la photosynthèse des plantes, des chercheurs du Collège de France ont développé un dispositif qui utilise la lumière du soleil pour transformer le CO2 en carburants.
Petit rappel: Schéma de la PHOTOSYNTHÈSE
L’idée du dispositif serait donc d’imiter artificiellement le principe de la photosynthèse pour se diriger vers une économie en cycle fermé où le CO2 émis dans l’atmosphère par les activités humaines serait capté pour refaire des carburants ou d’autres composés utilisés par l’industrie. C’est donc une solution durable qui permettrait de produire de l’énergie tout en limitant l’impact sur l’environnement et le changement climatique.
L’explication du fonctionnement de ce dispositif est assez simple: Une cellule solaire (cellule photovoltaïque) convertit l’énergie du soleil en électricité. Cette dernière aliment une cellule électrochimique* qui oxyde l’eau (produisant dioxygène et ions hydrogène) sur une électrode et réduit le dioxyde de carbone sur l’autre. (on retrouve le principe de réaction d’oxydo-réduction de la photosynthèse). Sur celle-ci, grâce à l’apport d’ions hydrogène et d’électrons, le CO2 se transforme en divers composés, comme par exemple du monoxyde de carbone O2 (schéma), méthanol, méthane etc.
*dispositif capable de générer de l’énergie électrique à partir de réactions chimiques ou d’utiliser de l’énergie électrique pour provoquer des réactions chimiques.
Des bactéries minuscules productrices de carburants
Dans la même idée de s’inspirer de la nature et des organismes qui cohabitent avec nous, des chercheurs étudient le fonctionnement des cyanobactéries, des micro-organismes photosynthétiques présents dans les océans. Encore très peu compris, le fonctionnement de ces bactéries aboutit néanmoins à une production massive (car elles sont très abondantes, 10 millions puissance 8 de Prochlorococcus et 700 septillions de Synechococcus!) d’hydrocarbures (en un an, elles produisent à elles seules entre 300 et 800 millions de tonnes d’alcane ! (hydrocarbure proche du gazole))
Une biologiste de l’université d’État Morgan (Baltimore, US) a reprogrammé génétiquement des cyanobactéries, cherchant à cultiver ces hydrocarbures. Cela pourrait à terme permettre de lutter contre l’exploitation des combustibles fossiles. Ces études ne sont qu’embryonnaires mais avec une meilleure connaissance de leur fonctionnement, on pourrait parvenir à produire des biocarburants à partir de la production de ces cyanobactéries.
Schéma du fonctionnement d’une micro-algue, organisme uni-cellulaire
Notons néanmoins que ces deux dispositifs de bioproduction ou de biomimétisme restent aujourd’hui limités. Les deux nécessitent des matériaux rares, coûteux et parfois même polluants. Les bactéries sont aussi par exemple très gourmandes en énergie et le rendement de la production reste discutable.
Les technologies d’émissions négatives
Capter, extraire de l’atmosphère puis stocker le dioxyde de carbone…
Deux types d’installations sont développées dans le but de “purifier” l’air (retirer le CO2 de l’atmosphère) et de stocker ou séquestrer ce CO2 atmosphérique, à l’enfermer dans des réservoirs souterrains comme ci-dessus
Le premier type d’installation correspond à la première phase: purifier l’air. Mais cette étape nécessite des techniques de récupération chimique très sophistiquées et consommatrices d’énergie et donc très coûteuses.
Ensuite, il s’agit de stocker le CO2 récupéré dans des réservoirs; on utilise d’anciens réservoirs d’hydrocarbures ou d’anciennes mines de charbons par exemple. Mais si cette fois le système est assez simple, il est très onéreux car les réservoirs sont souvent éloignés des sites émetteurs où le dioxyde de carbone est capturé.
On imagine aussi des réservoirs océaniques mais on ne connaît pas les possibles répercussions environnementales…
Je pourrais développer davantage sur ce sujet, mais en réalité aucun de ces dispositifs ne représente de véritable “révolution” et malheureusement, cela semble insuffisant pour parvenir à considérablement réduire le taux de carbone dans l’atmosphère. Le combat de fond qui doit être mené est une modification radicale des modèles économiques et de nos modes de consommation afin de “simplement” réduire nos émission de CO2.
Alors restons optimistes, des recherches sont indispensables pour repenser notre utilisation de l’énergie. Cependant il faut chercher dès maintenant à réduire notre émission de gaz à effet de serre et à vivre d’ici quelques décennies sans émettre plus de dioxyde de carbone que ne pourra alors en capter les océans et les écosystèmes terrestres. C’est pourquoi une modification du système économique et d’exploitation doit se faire ! Je renvoie vers un article de Mediapart intéressant:
Je pense que des mesures politiques sont alors indispensables. Encore une fois, la problématique est très large, et une politique écologique ne peut être efficace que si elle est en même temps sociale. Nous l’avons vu, nous sommes inégalement dépendants des énergies…
Salut Alice,
ta conclusion est juste. Les avancées en faveur du climat ne peuvent se détacher d’une révolution sociale. Pas un soulèvement populaire, une révolution dont parle Aurélien Barrau par exemple, l’astrophysicien (sa chaîne youtube est fascinante).
Mais pour l’instant, d’une part les dirigeants n’écoute rien, d’autres part, les gens sont encore dans le déni après trente ans d’avertissements des scientifiques. La seule solution c’est la décroissance énergétique donc économique. Les gens en ont encore très peur.
J’ai l’impression que nous avancerons quand beaucoup de gens se mettrons à faire autrement, sobriété volontaire, ce genre de concept, mais aussi quand la situation ne sera plus tolérable et occasionnera l’irréparable. Il sera peut-être trop tard pour beaucoup de chose mais ça sera peut-être une chance pour passer à autre chose. L’avenir le dira.
Et pour étayer mon propos, je trouve ultra-pertinent Aurélien Barrau,
Discussion avec la convention citoyenne pour le climat
https://www.youtube.com/watch?v=799aBDB2B9c
Intervention à “l’académie du monde d’après”
https://www.youtube.com/watch?v=7ogreuk2yWA
Faut un peu s’accrocher, c’est 6 cours de deux heures sur l’énergie, c’est passionnant.
L’énergie – Cours des Mines 2019 – Jancovici
https://www.youtube.com/watch?v=xgy0rW0oaFI
Sinon, une interview de lui sur thinkerview
Jean-Marc Jancovici : Anticiper l’effondrement énergétique ?
https://www.youtube.com/watch?v=Fp6aJZQldFs
Et mon philosophe actuel préféré, Edgar Morin. Il relie tous les problèmes (climatiques, sociaux, politiques, éducations, etc)
Congrès mondial pour la pensée complexe – Conférence inaugurale de Mr. Edgar Morin
https://www.youtube.com/watch?v=Py6wNI3Cl9g
Congrès Pensée complexe – Discours de clôture, par Edgar Morin
https://www.youtube.com/watch?v=SQd-mlt1W4g
ll fout la pêche ce mec. 98 ans.
Merci beaucoup pour cette réponse documentée! Je me rends régulièrement sur la chaîne d’Aurélien Barreau, je le trouve toujours très pertinent. Je pense que nous sommes à un moment crucial où tout notre modèle doit être remis en question et j’espère que les branches politiques s’en préoccuperont enfin. Il n’est pas encore trop tard, je pense que nous avons les outils nécessaires, mais il manque pour sûr la bonne volonté et la prise de conscience de chacun.
Bonne journée et encore merci d’être passé!